Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/221

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ces mots sont vraiment dans une crise fâcheuse, notre siècle leur fait une chasse impitoyable. On ne croit plus à celui de François Ier, Henri IV en a déjà perdu deux ou trois, Cambronne et Charles X n’ont joui qu’un moment de ceux qu’on leur avait attribués. Les réalistes sont vraiment insupportables avec leur passion de la vérité vraie. Ces jolies petites perles étaient si bien enchâssées dans nos chroniques ! Je suis fâché que M. Biot se soit associé à ces écumeurs de l’histoire. J’aime mieux son indignation contre la stupide barbarie des juges de Galilée, et le talent avec lequel il déroule les incidents si dramatiques de la découverte de ce grand astronome. Ce n’était pas pourtant son œuvre de prédilection. Son travail sur Newton était l’objet de sa préférence et d’une préoccupation singulière. Il prêtait une attention constante à tout ce que les Anglais écrivaient sur leur illustre compatriote. Il le lisait, il récoutait avec une sorte d’anxiété, et c’était avec une joie d’enfant qu’il reconnaissait, qu’il proclamait la supériorité de son travail. J’ai assisté à une de ces explosions de joie ; il avait alors quatre vingt-six ans, et je me demande, j’ai intérêt à le savoir, si à cet âge, qui touche de si près à la postérité, où l’on a eu tant d’occasions de se comparer, il n’est pas permis de se juger soi-même et de dire tout haut ce qu’on s’estime.

Cette bonne opinion qu’il avait de lui-même, nous l’avons ratifiée par nos suffrages. C’est par la partie littéraire de ses œuvres qu’il nous appartenait. C’est la richesse, la beauté de son style qui nous a inspiré le désir, j’ai presque dit l’ambition, d’honorer notre tableau d’un nom que s’étaient déjà approprié toutes les Académies de l’Europe. Je vous demande pardon, Monsieur, d’avoir repeint en raccourci une vie que