Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/467

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pensée de la Rochefoucauld : « L’envie de parler de nous et de faire voir nos défauts du côté que nous voulons bien les montrer, fait une grande partie de notre sincérité. » Cet ouvrage, où la narration domine encore, et dont l’ensemble, inégal d’ailleurs, dépasse de beaucoup l’étendue permise à une lecture publique, est semé de recherches heureuses et parfois assez neuves. Il suffit de citer le jugement, ou plutôt la découverte, sur le premier écrit de Retz, et sur la transformation que le jeune étudiant français avait fait subir au récit italien, dont il empruntait son début d’éloquence et de faction. D’un livre à la gloire de Doria il tirait l’apothéose de Fiesque, et d’un ambitieux vaincu il faisait un héros libérateur et victime. J’ignore si Richelieu connut ce changement de texte ; mais il devina l’intention, et en prévit la hardiesse et la portée, après lui du moins. L’auteur de l’ouvrage, en décrivant ces suites, a bien marqué et parfois sévèrement jugé la place de Retz dans la société politique de son temps. Mais on peut douter qu’il explique toute la part de sagacité supérieure qui conserve à l’adversaire malheureux de Mazarin un rang si élevé dans les lettres. Il admire fort son talent d écrire et la vivacité de ses récits ; mais il ne dit pas assez ce que le politique, souvent trompé dans ses entreprises, a laissé de pensées profondes et vraies à l’historien.

Ce travail n’en a pas moins paru devoir, pour la justesse habituelle du sens, la précision des recherches et quelques morceaux d’un style ferme et sain, partager le Prix avec une œuvre plus courte et plus vive, où la pensée souvent généreuse est sans déclamation, mais dont quelques parties sont moins étudiées et moins complètes. C’est le discours inscrit