Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/490

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porte, c’est qu’une polémique inévitable soit toujours bienséante, qu’elle discute, sans accuser ; qu’en attaquant les faux systèmes, elle admette la liberté d’opinion, et le droit de l’esprit, non pas seulement au travail, mais à l’erreur ; qu’enfin elle n’exagère pas cette erreur, qu’elle en accepte parfois les inconséquences comme un désaveu, et soit impartiale à reconnaître le talent et la bonne foi qui peuvent s’y mêler.

Cette réserve, cette équitable courtoisie que l’apologiste de l’Idée de Dieu a portée dans ses réponses en a doublé la force et le mérite littéraire. Par là, ce livre, où de vieilles erreurs de matérialisme et de sophistique, renouvelées avec plus de raffinement par Hegel, sont encore une fois détruites, est en même temps une élégante exposition de philosophie spiritualiste et de pure esthétique, inachevée, sans doute, aux yeux de l’auteur qui en promet la suite, mais satisfaisante pour la méthode, et persuasive par l’accent du cœur, autant que forte de raison. À cet ouvrage d’un effet moral et déjà populaire, l’Académie décerne un prix de 2,500 francs, comme à l’ouvrage d’un ordre élevé dans l’histoire, la Cité antique, par M. Fustel de Coulanges.

Un livre de littérature classique étudiée pour un but moral, un livre de savoir judicieux et fin, écrit avec art, les Moralistes sous l’Empire romain, par M. Martha, obtient le même honneur. Ici encore se retrouvent la recherche d’histoire et la leçon de philosophie, mais tempérées par cette modération élégante et ces vues de l’esprit, qui plaisent plus qu’elles ne démontrent. Dans ce travail, Sénèque, Tacite, Perse, Juvénal, gardent leur rôle de témoins éloquents de Ja conscience humaine sous le pouvoir absolu. La forme de leur