Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/557

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Pour moi… Je le connais pour l’avoir pratiqué ;
Voici deux ans, il m’a, s’il vous plaît, appliqué
Un large coup d’estoc, en plein, dans la poitrine,
À moi qui ne suis pas novice, j’imagine ;
D’où je conclus qu’à l’heure où son fer vous joindra,
On peut parier cent contre un qu’il vous tuera.

OCTAVE, (gaiement).

Et vous nommez cela me rendre confiance ?

MAURICE, (avec force).

Oui, mon ami ! mon frère ! oui, car l’expérience
Dit que, quand un danger menace un brave cœur,
Le seul et vrai moyen qu’il en sorte vainqueur
N’est pas qu’on le lui cache, ou bien qu’on le lui farde.
Mais qu’on lui dise : Ami, la mort est là, regarde !

OCTAVE

Allez !

MAURICE.

Je vous dis donc sans peur : Votre ennemi
Ne frappe qu’à coup sûr, et jamais à demi ;
Sa science est profonde, et sa ruse infernale ;
Sa main est foudroyante… implacable… fatale…
Et vous, vous n’êtes rien qu’un enfant ! mais l’enfant.
Quand avec désespoir et rage il se défend,
Peut parfois, croyez-en une âme bien trempée,
Peut décontenancer la plus terrible épée !
Donc reprenez ce fer ; mais laissez cette fois
Votre demi-science avec ses vaines lois,
Et sur moi jetez-vous en aveugle, sans règle.