Page:Académie française - Recueil des discours, 1880-1889, 1re partie, 1885.djvu/349

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rigoureuses. Le propre, au contraire, de l’expérimentation, c’est de ne pas en admettre d’autres.

L’expérimentateur, homme de conquêtes sur la nature, se trouve sans cesse aux prises avec des faits qui ne se sont point encore manifestés et n’existent, pour la plupart, qu’en puissance de devenir dans les lois naturelles. L’inconnu dans le possible et non dans ce qui a été, voilà son domaine, et, pour l’explorer, il a le secours de cette merveilleuse méthode expérimentale, dont on peut dire avec vérité, non qu’elle suffit à tout, mais qu’elle trompe rarement et ceux-là seulement qui s’en servent mal. Elle élimine certains faits, en provoque d’autres, interroge la nature, la force à répondre et ne s’arrête que quand l’esprit est pleinement satisfait. Le charme de nos études, l’enchantement de la science, si l’on peut ainsi parler, consiste en ce que, partout et toujours, nous pouvons donner la justification de nos principes et la preuve de nos découvertes.

      L’erreur d’Auguste Comte et de M. Littré est de confondre cette méthode avec la méthode restreinte de l’observation. Étrangers tous deux à l’expérimentation, ils donnent au mot expérience l’acception qui lui est attribuée dans la conversation du monde, où il n’a point du tout le même sens que dans le langage scientifique. Dans le premier cas, l’expérience n’est que la simple observation des choses et l’induction qui conclut, plus ou moins légitimement, de ce qui a été à ce qui pourrait être. La vraie méthode expérimentale va jusqu’à la preuve sans réplique.

Les conditions et le résultat quotidien du travail de