Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/439

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veilla avec un joli chiffre de dettes et, confiant dans la profession de foi paternelle : « Tout nous donner et tout nous dire », il alla conter son embarras à Dumas père, qui lui répondit avec son insouciante bonhomie : « Tu as cinquante mille francs de dettes ?… J’en ai cinq cent mille… Fais comme moi, travaille pour les payer ! »

Le jeune homme suivit ce conseil et, comme le célèbre auteur des Trois Mousquetaires gagnait beaucoup d’argent avec le roman-feuilleton, il résolut d’écrire, lui aussi, des romans. Jusque-là il n’avait composé que des vers : — une comédie en un acte, Le bijou de la Reine, et des poésies éditées en 1848 sous le titre de Péchés de jeunesse, et plus tard quasi désavouées par leur auteur : « Alors, disait-il, je croyais encore à mes vers. J’en suis revenu. » Les contes, les nouvelles et les romans publiés par Dumas fils, de 1846 à 1852, sont nombreux : Aventures de quatre femmes, Antonine, Le docteur Servan, Le régent Mustel, La Dame aux perles, Diane de Lys, La Dame aux camélias. Il les écrivait avec une hâtive facilité, sans grande recherche de style. Les éblouissants succès de l’auteur dramatique ont rejeté dans l’ombre presque toutes les œuvres du romancier. Pourtant on les relit encore avec agrément. Quelques-unes ont la beauté du diable : du naturel, de l’entrain, un dialogue alerte et spirituel ; d’autres, plus compliquées, montrent déjà cette connaissance du cœur, cette observation clairvoyante, cette entente des situations, qui annoncent un moraliste et un homme né pour le théâtre. Toutefois, même pour les meilleures productions comme La Dame aux camélias, même pour ce roman écrit postérieurement et plus célèbre,