Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/480

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Francillon. Tantôt, avec le Rémonin de l’Étrangère, avec le Leverdet de l’Ami des Femmes, avec le Barantin des Idées de Madame Aubray, il l’exposait à la façon d’un professionnel de laboratoire ou de bibliothèque. D’autres fois, il solennisait cette pensée avec un Montaiglin ou un Claude Rupert au point de faire prononcer sur les planches des phrases qui ne s’entendent que dans les églises. Qui n’a frémi à la magnifique prière du troisième acte, dans la Femme de Claude : « Créateur de toutes choses, maître tout-puissant de l’espace, du temps, des mondes, de tout ce que nous voyons, de tout ce que nous ignorons… Cette femme a parlé de repentir, faites que cela soit vrai ! Amenez à la lumière et à la vérité cette âme attardée et pleine de ténèbres… » ? Mais, solennisées, professées, ou simplement causées, ces idées n’étaient jamais conventionnelles. Non seulement l’écrivain les croyait vraies, mais il les avait éprouvées vraies. Derrière ses doctrines, sa personne était là, avec son énergie et son courage d’ « outlaw », d’homme indépendant et isolé, comme le Moïse dans lequel Vigny a célébré la destinée du législateur ; et n’y avait-il pas du législateur, comme vous l’avez si bien dit, dans cette ambition d’atteindre les mœurs à travers l’art, professée ouvertement par Dumas ? Mon Dieu, vous m’avez fait puissant et solitaire…

En faut-il plus pour expliquer que les dévotes de ce génie passionné aient été innombrables et en France et à l’étranger. C’est le plus dangereux des triomphes pour un écrivain que ces dévotions-là, mais aussi le plus flatteur et le plus envié. Et les poètes, les romanciers, les auteurs dramatiques ont-ils si