Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/455

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relevé la Madeleine, me pardonnera cette pensée. À présent, je puis mourir, il me semble que nous habiterons le même coin du ciel.

– Vous êtes ma sœur, Geneviève, et une autre vie que vous ne partageriez pas me serait amère, lui dit Belle-Rose.

Geneviève lui pressa la main doucement.

– Vos paroles sont bonnes au cœur, reprit-elle, mais à présent que je me suis confessée, vous disant tout ce qu’il y avait en moi, me permettez-vous bien de vous parler de vous-même ?

– Parlez, Geneviève.

– J’ai causé toute la nuit avec Suzanne ; c’est une pauvre âme déjà fortement éprouvée ; elle s’est ouverte à moi comme une sœur à sa sœur, et je sais quelles douleurs vous ont agités tous deux depuis la soirée de Villejuif. C’est la main de Dieu qui vous a tous conduits ici. Vous y êtes entrés errants et proscrits, vous en sortirez libres et mariés.

Belle-Rose tressaillit à ces mots.

– Si le malheur vous visite, au moins serez-vous deux à le supporter ; si le bonheur vous sourit enfin, il vous paraîtra plus doux étant ensemble, ajouta Mme de Châteaufort. Il ne faut pas que vous quittiez cet asile sans qu’un prêtre ait béni votre amour. Deux époux peuvent vivre à l’ombre de cette abbaye ; deux amants le pourraient-ils ?

– Ce que Suzanne voudra, je le ferai, dit Belle-Rose.

– Suzanne est prête, répondit Geneviève d’une voix émue ; dans trois jours vous serez mariés.

Belle-Rose, après ces mots, se retira plein de trouble. Demeurée seule, Mme de Châteaufort s’agenouilla devant son prie-Dieu, toute pâle et les mains jointes.

– Mon Dieu ! dit-elle d’une voix brisée par les sanglots, bénissez-les et qu’ils soient heureux !

Elle resta longtemps immobile, le front courbé sous