Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/275

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à cheval aurait eu grand-peine à y passer. À un quart d’heure à peu près de la dernière maison du village, il aperçut un feu qui flambait au milieu du chemin. Carquefou se coucha à plat ventre et rampa sur la bruyère ; deux autres feux brûlaient sur les côtés de la route, l’un à droite, l’autre à gauche. Des ombres passaient devant les flammes d’un pas méthodique ; il lui semblait que ces ombres avaient des fusils sur l’épaule.

« Eh ! eh ! voici que ça se gâte ! » pensa Carquefou.

Il rampa un peu plus loin, et, levant la tête du milieu d’un buisson dont il écarta silencieusement les branches, il compta une vingtaine de feux dispersés le long de la forêt. Des sentinelles veillaient autour de ces feux. Bientôt le pas lent et régulier d’une troupe en marche frappa son oreille ; il s’étendit sous les branches basses du buisson, retint son souffle et attendit.

Une patrouille d’infanterie commandée par un sergent passa près de lui.

Carquefou compta douze hommes portant le mousquet.

« J’aurais bien pu en démolir deux ou trois, pensa-t-il ; mais après ?… j’imagine que les autres m’auraient un peu cassé. »

Le résultat de cette réflexion fut qu’il montra ses talons aux Impériaux et regagna le village sans bruit.

— De la cavalerie en tête et de l’infanterie en queue, c’est complet ! murmurait l’honnête Carquefou, tout en marchant.

Il rencontra Magnus, qui faisait une ronde.

— Soyons humains, lui dit-il, l’incendie serait inutile.

Et il lui fit part de ce qu’il avait vu.

— M. de la Guerche parlait hier de la Providence, ajouta-t-il ; qu’elle serait la bienvenue, si elle arrivait sous la forme d’un bon régiment suédois !