Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/353

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Les dragons s’éloignèrent.

Marguerite s’agenouilla sur un tertre, et tout bruit mourut dans la plaine.

Magnus, resté seul, se pencha parmi les morts et choisit une casaque aux couleurs impériales, qu’il endossa ; le sang et la poudre dont il macula son visage lui firent un masque ; il se coiffa d’un casque bosselé, et, méconnaissable à tous les yeux, le vieux partisan gagna l’extrême limite du champ de bataille.

Quelques gémissements s’élevaient de la plaine et indiquaient seuls qu’un reste de vie s’y débattait.

Nous allons abandonner pour un instant M. de la Guerche et Magnus, et rejoindre M. de Chaufontaine, lancé avec M. de Collonges à la poursuite du grand maréchal de l’empire. Il lui fallait cet homme, mort ou captif.

Le Croate, dont il surveillait les mouvements, galopait dans la direction de Leipzig. Çà et là, mais à de rares intervalles, on apercevait quelques groupes de soldats débandés. Ceux-là jetaient leurs armes à la vue des dragons suédois et prenaient la fuite ; d’autres, épouvantés, se mettaient à genoux et demandaient grâce ; un certain nombre, infidèles au drapeau vaincu, et privés de leurs chefs, se ralliaient à l’escorte du marquis et criaient :

— Vive Gustave-Adolphe !

Une pauvre maison, dont les vitres à demi rompues brillaient dans la nuit, se montra sur l’un des côtés de la route. Le Croate étendit la main.

— C’est là ! dit-il.

Des ombres passaient devant les fenêtres ; un groupe de cuirassiers sanglants, mutilés, mais l’épée au poing, veillaient autour de la maison. À l’aspect de Renaud, ils se rangèrent devant la porte.

— Bas les armes ! dit Renaud ; vous êtes dix et nous sommes trente !

Une voix mâle se fit entendre dans l’intérieur de la chaumière ;