Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/355

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— Quelques bandes en déroute, des escadrons dispersés.

— Et le duc de Friedland, notre chef ?

— Il est en fuite.

— S’il est vivant, rien n’est perdu.

M. de Pappenheim fit un effort, et, sans quitter la garde de son épée :

— Et Gustave-Adolphe ? ajouta-t-il.

M. de Chaufontaine baissa la tête sans répondre.

— Et Gustave-Adolphe ? répéta le blessé avec plus de force.

— Il est mort, dit Renaud.

— Mort ! s’écria le grand maréchal ; mort, le roi de Suède !

Alors, levant son corps, les mains toutes frémissantes, le visage transfiguré :

— Béni soit le Dieu qui m’a permis d’apprendre avant la dernière heure que l’implacable ennemi de ma religion et de mon pays a perdu la vie ! s’écria-t-il. Non, la bataille n’est pas perdue si Gustave-Adolphe n’est plus ! Qu’importe que cinquante régiments aient été brisés comme ce fer est brisé lui-même ! Je meurs content… Lui mort, l’Autriche est triomphante !

Un coup violent frappé à la porte l’interrompit ; un cuirassier entra, précédant un courrier qui mit un genou en terre.

— J’arrive de Madrid, dit cet homme, et le roi mon maître m’a ordonné de remettre ce coffret aux mains du grand-maréchal de l’empire.

M. de Pappenheim s’empara du coffret et l’ouvrit. Bientôt les insignes éclatantes de l’ordre fameux de la Toison d’or brillèrent entre ses doigts tremblants ; une sorte d’extase illumina son visage.

— Enfin ! murmura-t-il.

Un frisson le prit.