Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/81

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Plein d’une mortelle angoisse, il se débattait ; il voulait crier, mais sa gorge serrée ne laissait échapper aucun son ; ses membres se crispaient sous la tension des muscles, et il ne parvenait pas à se soulever. Tout à coup, enfin, il ouvrit les yeux. Quatre visages terribles étaient penchés sur sa tête ; des lanières de cuir liaient ses pieds ; d’autres s’enroulaient autour de ses poignets, et, avant même qu’un seul cri pût jaillir de ses lèvres, une main violente s’appesantissait sur sa gorge et le bâillonnait.

Tout cela n’avait pas pris deux minutes depuis l’instant où le panneau s’était ouvert jusqu’au moment où M. de la Guerche, pareil à un mort qu’on va clouer dans sa bière, gisait devant Mathéus Orlscopp.

— Me reconnaissez-vous ? dit le faux moine, tandis que deux de ses complices chargeaient Armand-Louis sur leurs épaules robustes ; vous avez eu la première manche, à moi la revanche !

Les deux hommes et leur fardeau vivant disparurent dans la muraille, et Mathéus Orlscopp se tournant vers maître Innocent, qui tremblait un peu :

— À l’autre, maintenant, dit-il.

Bientôt après, la scène qui venait de se jouer chez M. de la Guerche se jouait chez M. de Chaufontaine. Le même panneau de bois glissait dans sa rainure, les mêmes hommes armés des mêmes lanières se penchaient autour du lit de Renaud, la même main impitoyable serrait son cou, tandis que des nœuds indestructibles emprisonnaient ses bras et ses jambes, et il sortait de sa chambre par le même chemin qu’avait suivi M. de la Guerche pour sortir de la sienne.

— Surtout ne faisons pas de bruit, murmurait maître Innocent, que le moindre son faisait tressaillir. Il y a là-bas deux coquins qui n’entendent pas raillerie. Nous sommes dix,