Page:Achard - Rosalie de Constant, sa famille et ses amis, II, Eggimann.djvu/227

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ne serait-il pas possible d’en faire venir une tonne qui coûterait moins ?… On est tranquillisé sur le passage des armées en Suisse.

25 octobre. — Tous les jours la bonne Tante apporte son dîner qui fait le fonds du nôtre. Le soir, lorsqu’elle s’est bien tuée de fatigue, elle vient dormir sur notre lit de repos et se réveille quand on lit Mme  de Staël. C’est vraiment un ouvrage admirable. S’il charme et transporte par les détails, par les mots heureux et sensibles, rien n’est plus triste et désolant que le résultat : — Êtes-vous sans passions ? Vous n’êtes qu’à moitié créé, vous ne traînez qu’une misérable existence. Avez-vous des passions ? Vous êtes dévoué au malheur, et n’avez de vraie ressource que le suicide. Bref, lorsqu’on a fini ce livre, on n’aime ni l’auteur, ni soi, ni la vie, et l’on a peu d’espérance pour l’avenir. Ce n’est pas ainsi que parlent Rousseau, Bernardin de Saint-Pierre, Bonnet, tous les philosophes bienfaisans qui nous consolent au moins par de belles théories des tristes réalités.

Bussigny, samedi soir 29 octobre. — J’étouffe de colère contre Benjamin. Il faut