Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/168

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la faisait vivre : AEMAETH ; il effaça précipitamment la première syllabe, et le corps tomba aussitôt à terre.

Le manteau était étendu sur cette masse informe ; on aurait dit un de ces tas de sable que ramassent les servantes, et sur lesquels elles étendent un linge quand on les rappelle à la maison, pour que personne ne vienne y toucher.

Ni l’archiduc ni Bella ne jetèrent un regret à cette masse d’argile ; en un tour de main le prince enleva Bella dans ses bras, avec tant de précipitation, qu’il fit tomber la torche ; il la porta, cachée dans son manteau, jusqu’à une fontaine, où il se lava d’eau fraîche les mains et le visage, pour effacer toute trace de l’attouchement qu’il avait eu avec cette trompeuse créature d’argile.

Lorsqu’il se fut purifié, il baisa la vraie Bella sur les lèvres, et lui avoua comment toutes ces faussetés l’avaient fait tomber dans un piége infâme, et la pria de lui raconter comment elle se trouvait dans ces habits.

Bella se retrouvant en possession d’un trésor qu’elle avait cru perdu, était cependant très-agitée, et cherchait à paraître joyeuse et calme. C’était bien encore les mêmes liens qui les unissaient, mais ils n’avaient plus cette première fraîcheur, semblable au duvet d’un beau fruit, que le contact du monde enlève bien-