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ÉTIENNE GROSGLAUDE

ses concitoyens, il est préférable encore de les plaindre et de travailler à les rendre meilleurs, et je sentis que la France me réclamait. Cependant je ne savais comment me rendre utile.

Or, un soir, comme je songeais, je regardai machinalement le petit éléphant de porcelaine rouge qui dormait sur ma table, et voilà que le petit éléphant me regarda aussi, gentiment, avec de bons yeux tout ronds, en agitant sa trompe. Tout de même, j’eus quelque étonnement ; je crus rêver et cherchai un binocle. Le petit éléphant sourit ; il éleva encore sa trompe, puis la baissa, et, comme s’il n’avait jamais fait autre chose, il parla. C’était un petit éléphant bien dressé.

« Pourquoi cet œil effaré, ô mon maître, et pourquoi me contempler avec tant de surprise obstinée ? Ne sais-tu pas que nous aussi nous parlons ? Tu me peines. Depuis des années tu t’assieds à cette table, chaque jour, et chaque jour tu alignes des jambages noirs sur du papier blanc, et tu as, paraît-il, beaucoup d’esprit. Cependant ton métier t’ennuie et tu t’ennuies d’avoir tant d’esprit. Que de gestes