Page:Acker - Petites Confessions, sér1, éd3.djvu/153

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de Ville, la Vérité, entraînant les Sciences à sa suite, répand sa lumière sur les hommes, et vous oubliez la grande composition qui orne l’amphithéâtre de chimie de la Sorbonne. C’est celle-là que j’aime le plus, mais je ne sais pourquoi il faut insister pour la voir ; on ne l’a pas comprise, je crois, et on ne la montre qu’avec prudence. Cependant, si l’appariteur qui conduit les visiteurs s’aperçoit qu’elle leur plaît, il sourit, et, comme s’il confiait un secret dangereux, il murmure : « On prétend que c’est ce que nous avons de mieux. » Je pense, voyez-vous, qu’on me reproche surtout de m’être dispersé ; j’ai peint des portraits, j’ai peint des décorations murales, j’ai peint des pastels, j’ai peint des aquarelles, et j’ai fait de la gravure. Chez nous, on n’accorde une valeur tout à fait supérieure qu’à ceux qui se spécialisent dans un genre, mais moi j’éprouve un impérieux besoin de passer de l’un à l’autre.

Une invisible horloge sonna une heure. La tenture qui cachait l’atelier de sculpture de Mme Besnard se souleva, et son fils vint réclamer son père pour le déjeuner, depuis longtemps servi. Mille questions montaient encore à mes lèvres, et j’en énonçai à la hâte quelques-unes :

— Mes goûts privés, fit M. Besnard, tandis qu’il gagnait la salle à manger, mes goûts privés... rien ne m’enchante autant que les récits des très vieilles dames, qu’on traite de radoteuses.