Page:Acker - Petites Confessions, sér1, éd3.djvu/44

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teur, et je vous prie de vous taire et de ne pas bouger. »

Des sourires, je l’avoue, couraient sur les lèvres des fidèles et ces sanglants reproches semblaient causer plus de plaisir que de peine. Le P. Ollivier s’en aperçut bien. Il se redressa, leva les bras au ciel, puis se penchant de nouveau, d’une voix plus douce, il soupira : « Oh ! je le sais, mes prédications n’auront sur vous aucun effet. Les femmes spirituelles, qui sont là, diront demain dans leurs salons, en recevant leurs amies : « Oh ! oh ! il va un peu loin, ce brave Père ; il est impertinent, il est insolent ; mais il est si amusant ! » N’est-ce pas, je suis amusant ? Vous venez ici comme au théâtre. Et vos maris, messieurs vos maris, qui ont pour leur toit conjugal des principes qu’ils n’emportent jamais quand ils sortent, ils s’indigneront. « Comment a-t-il osé dire cela ?… Non, non, c’est trop. » Et ils vous empêcheront de revenir. Je ne me leurre d’aucune illusion. » Cette tristesse cependant ne dura pas : elle se changea en colère : du haut du ciel, la vengeance divine guettait toutes ces âmes légères et vaines. Dieu bientôt s’amuserait de ces pécheurs endurcis, et rirait, et le P. 0llivier, lui aussi, s’amuserait et rirait. À chacun son tour. Ridebo ego quoque

Comme dix heures sonnaient, et que les auditeurs quittaient l’église, un homme, de petite taille, bedonnant et voûté, caché dans un grand manteau noir, traversa d’un pas fatigué le long couloir qui va de la sacristie à la rue Saint-Antoine…