Page:Acker - Petites Confessions, sér1, éd3.djvu/66

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intelligence et des vérités déjà conquises par elle. Les cobayes, dans leur cage de verre, poussaient de petits cris et, par la porte entr’ouverte, j’apercevais, dans la pièce voisine, étendu sur la table, un lapin dépecé et sanglant, les membres écartés et cloués. Était-ce de la science que j’écoutais les victoires, ou de l’utopie que j’entendais les rêves ? Que m’importait pourtant qu’on pût reculer la mort ? et si loin qu’on pût la reculer, ne demeurait-elle pas l’inévitable ? Étrange et terrible misère de la nature humaine ! Si même on parvenait à prolonger la vie d’un ou de deux siècles, n’aurions-nous pas alors horreur de la vie et ne dirions-nous pas comme cette centenaire de Tokarski : « Si tu vivais autant que moi, tu pourrais comprendre qu’il est non seulement possible de ne pas craindre la mort, mais même de la souhaiter et sentir le besoin de mourir comme on sent le besoin de dormir » ? Alors, à quoi bon !