chacune de se récrier et de servir leurs ironies au bisaïeul, présent, vers cette heure-là, pour boire de la limonade, dans l’attente de son courrier volumineux.
― Et pourquoi non ? Répondit le vieillard. L’abbé Grégoire fût des nôtres. Il a présidé la Convention. Il a dit au Sénat des vérités courageuses devant le maître qui écrase l’Europe… en attendant que l’Europe l’écrase.
― Ah ! Ah ! Ricanait la tante Malvina. Je voudrais bien voir cette aventure-là…
― Vous le verrez, belle dame, vous le verrez… Les carbonari des Siciles, le Tugendbund des Allemagnes châtieront l’homme oublieux de ses promesses… Quelque chose de formidable se lève contre lui…
― Rafraîchissez-vous le sang avec cette limonade, Monsieur, et laissez-moi l’empereur, qui se moque de vos conspirations… Les hommes n’ont pu le vaincre. En Russie, il a fallu les cataclysmes les plus atroces de la nature pour l’abattre un instant… Mais… depuis !… Ah !
― Il se peut, concéda Mme Héricourt, que son étoile le sauve…
― Voyons, il est fou d’y contredire… il va conclure une paix glorieuse.
― Oh ! la paix !… douta Caroline.
― Ciel ! dit Virginie en lâchant son ouvrage.
― Praxi-Blassans m’écrit qu’on ne s’accorde pas sur les conditions. On a donné l’ordre aux troupes d’avancer au 10 août la fête de l’empereur, comme si, cinq jours plus tard, on devait être en campagne. Cela est un signe.
― Eh bien, tant pis pour les autres ! L’armée du duc de Reggio menace Berlin par le sud. De Lübeck, le prince d’Eckmühl y marchera par le nord. Bernadotte sera battu. Je comprends que Napoléon veuille châtier l’orgueil de l’ingrat. Et ce Moreau qui revient d’Amérique pour passer à l’ennemi !