Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/62

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pris. À Schœnbtrunn, à Vienne, on parlait d’un soulèvement de l’arrière-garde. Par malheur, messieurs les Sublimes Chevaliers, les maîtres du grand Orient, nous envoyèrent message sur message dans les loges militaires, pour nous interdire de répondre à l’appel des jacobins.

— Oui, notre devoir, — interrompait le bisaïeul, — était, à cette époque, d’épargner l’homme que les soldats considéraient comme leur fétiche de victoire. Il fallait consommer, avant tout, la ruine des monarques, cela malgré l’avis de Bernadotte et de Fouché.

— Vous n’avez réussi qu’à rétablir plus solidement un nouveau trône…, qu’à soumettre au despote les forces suprêmes de la République, hurla l’oncle revenu d’Espagne, les bras au ciel.

Et il perdit la respiration.

― La République…, les monarques l’eussent écrasée mieux encore, en restaurant ici la féodalité, s’ils étaient entrés avec des troupes triomphantes…

― Non, mon père ! Parce que le peuple aurait aperçu clairement la vérité. Il eût repoussé le joug ! Tandis qu’en Napoléon, il voit toujours le soldat de la convention, l’admirateur de Robespierre, l’ami des terroristes, canonnant à Toulon les partisans des Girondins… Et la nation laisse tuer une à une les libertés, au nom de la liberté !

Le capitaine se précipita vers le bisaïeul. Autour de son corps maigre, les os de ses bras, les os de ses jambes trépignaient… il proféra :

— Et vous, les chefs de la maçonnerie… vous les Sublimes Maîtres du Royal Secret, vous-même, Grand Inquisiteur de la Stricte Observance, vous avez trahi l’Ordre et la République, en obligeant à l’obéissance les états-majors d’Espagne, le lendemain de l’assassinat d’Oudet. Six mille philadelphes, tous officiers, eussent mené leurs troupes contre les valets du des-