Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/290

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turne fut au-dessus de la seconde façade, les aboiements du chien lui parurent bien moins sonores ; mais quand il fut parvenu à la façade opposée à celle où était située sa chambre, c’est à peine si le bruit de ces aboiements parvenait jusqu’à lui. Une réflexion subite s’empara de son esprit.

— Mais, se dit-il, si de ce côté, qui est à l’opposé de ma chambre et de celle de mon père, on entend à peine la basse taille de cet énorme chien, il me semble qu’il serait impossible d’entendre, de l’endroit où sont nos chambres, les sons qui viendraient de ce côté. Essayons.

Et le cœur tremblant d’émotion, il refit le tour de la maison, rentra chez lui, et saisissant son violon et son archet, il reprit le chemin de la façade opposée. Là, s’accroupissant dans l’étroit espace que laissaient entre elles une cheminée et une lucarne, notre Orphée aérien se donna un concert auquel il trouva certes plus de plaisir que ne lui en purent jamais procurer les plus belles exécutions musicales. Il y avait si longtemps qu’il n’avait touché au violon ! Ses doigts lui parurent d’abord un peu rebelles, mais il finit par s’oublier. Sa tête s’enflamma, les idées musicales lui venaient en foule, et par un bonheur rare, elles semblaient se conformer, par leur simplicité et leur facilité, à l’impuissance de ses moyens d’exécution. Pendant plus d’une heure il improvisa, oubliant tout, excepté le bonheur dont il jouissait. Le plus beau trône du monde, il ne l’eût pas accepté pour l’échanger contre ce petit bout de toit, contre ce rebord de lucarne où