Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/299

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— Mon cher garçon, dit le père, je suis fort inquiet

— Et de quoi donc ? dit le fils avec étonnement.

— D’une aventure, un sot conte qui court par toute la ville, et que tu ne comprendras pas plus que moi. On prétend qu’on a vu à plusieurs reprises rôder pendant la nuit un homme sur les toits de cette maison. Ce ne peut être qu’un malfaiteur ; nous sommes ici fort isolés : il n’y a que ta chambre et les greniers qui donnent sur ce toit, et pour ta sûreté personnelle et ma tranquillité à moi, j’ai amené ce brave homme qui va poser un bon grillage à ta fenêtre et te mettre à l’abri de toute tentative du dehors.

Je ne saurais trop dire à quelle nuance de vermillon, de pourpre ou de coquelicot, appartenait la rougeur répandue sur les traits du jeune Dalayrac pendant le commencement de cette allocution, dont la conclusion fut un coup de foudre pour lui : son air était si confus et si désespéré que son père en eut pitié. Voyons, remets-toi, lui dit-il avec bonté, il ne faut pas prendre trop au tragique ces sots propos : ce que je fais ici, n’est qu’une simple mesure de précaution. Cela donnera bien un air un peu lugubre à ton appartement ; mais à présent que tu as un état, tu es libre, entièrement libre, d’y demeurer ou de n’y pas demeurer ; tu peux même faire de la musique et jouer du violon si cela te fait plaisir.

— Vraiment ?

— Certainement, à présent que tu sais ce que je voulais que tu apprisses, il n’y a nul inconvénient