Page:Adelsward-Fersen - Et le feu s’éteignit sur la mer.djvu/115

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Mais vous savez que je n’ai plus rien et mon mère ne me pardonnera jamais. Elle prononça ce : jamais, avec une infinie tristesse.

— C’est justement parce que vous n’avez plus rien que je vous épouse, Muriel, si vous me l’accordez. Vous croiriez, peut-être, à une fantaisie d’artiste, à un dédain facile de l’argent — argent que j’ai trop méprisé — disait Chateaubriand. Mais je ne veux pas de cet empoisonneur de l’amour. Avec le peu que j’ai, avec mon travail et vous à mon foyer, nous irons de l’avant, et tant pis pour les autres. Il me paraît, à moi, que je resterai au moins en dehors de ceux que vous aurez connus jusqu’ici et qui venaient flairer des jupes et des portefeuilles. Et puis, au moins, comme mari, j’aurai le droit aux yeux du monde, du monde mesquin, humeur de scandales, j’aurai le droit de vous soutenir et de vous protéger…

Well, little boy, interrompit alors Muriel, très émue, avez-vous donc oublié le prince ?

Gérard ne fit pas un mouvement. Il recevait cela en plein cœur. Seulement un coup de rage lui montait au cerveau, lui faisait crisper les poings et les maxillaires mauvais, l’œil loin, Gérard pensa qu’il ferait bon étrangler un pareil misérable.

— Eh bien quoi ? Je viens vers vous après avoir