Page:Adelsward-Fersen - Et le feu s’éteignit sur la mer.djvu/143

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Et Gérard évoquait l’histoire de cette falaise arrogante qui à elle seule avait constitué un petit royaume au temps de Jeanne de Naples et des Aragonais. Maintenant les ruines s’accumulaient sur les ruines. Les derniers rois de Naples avaient fait de ce nid d’aigle une vaste prison. Puis la monarchie nouvelle, tout en conservant la propriété, ouvrait la porte aux prisonniers mais fermait la geôle aux visiteurs.

Ainsi, depuis quarante ans, ces châteaux improbables de la Belle au Bois dormant ne connaissaient plus le bruit des foules. Le désert se faisait autour de ses cimetières et de ses décombres : L’Île des morts… !

Sous la conduite d’un petit pêcheur de quinze ans riant sans cesse, d’un petit pêcheur qui n’avait de clair dans sa figure dorée que l’éclair de ses dents éblouissantes, ils s’engagèrent sur un pont-levis défendu par d’énormes portes en madriers dont les serrures figuraient en relief les armes de Castille. Puis ce fut une succession de cours à guérite, de postes à bastilles, de créneaux et de tours intérieures que le lierre et les figuiers d’Inde, poussés au hasard, escaladaient. Ensuite, Gérard, suivi par les autres, les guida à travers un tunnel, taillé dans la falaise même, et qui montait comme un escalier du