Page:Adelsward-Fersen - Et le feu s’éteignit sur la mer.djvu/78

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houette, musardant sur un profil de médaille, jusqu’à ce qu’au souvenir des Galeries traversées, à l’évocation de certains marbres ou d’un vieux bronze, il ne se décourage, abandonne le travail commencé, et se mette à écrire frénétiquement. D’ailleurs, l’absence complète d’amis, le manque de nouvelles de sa famille attristaient Gérard. Il eût désiré un compagnon à qui communiquer son enthousiasme. Parfois, aux premiers temps d’un beau voyage les impressions ont besoin de se dire : L’admiration, comme l’amour, cherche les confidences. Un de ces soirs, où Gérard Maleine avait ainsi l’âme transfigurée, il pensa à Muriel Lawthorn laissée là-bas à Paris sans presqu’un mot d’adieu. Un bas-relief de la Collection Borghèse lui avait singulièrement rappelé l’allure pleine à la fois de défi, de puérilité et de grâce de la jeune américaine.

Sur ce bas-relief qui représentait des mimes en l’honneur d’un Dieu, une bacchante dansait, la tête rejetée en arrière, fiévreuse et surhumaine. Ses mains frappaient le tambourin au rythme de la danse. Ses pieds agiles semblaient à peine frôler la terre…

Par quel mystère cette vierge antique ressemblait-elle à la fille d’une race neuve transplantée en plein XXe siècle dans la ville la plus cosmopolite de la