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FIANCÉS

Alors l’enfant se redressa, se raidit sous l’apparente douleur. Elle essuya dans ses yeux obscurs une larme. — Oh ! les larmes des aveugles ! — puis, tournée vers Jacques, longuement :

— Je vous remercie, mon ami, de cette offrande, de ces paroles. Je m’en souviendrai toujours, parce que, dans la nuit où je reste, les jours comme celui-ci demeurent lumineux. Je vous remercie, mais.

— Mais… oh ! dites… quoi, s’écria Jacques.

— Mais c’est impossible, dit Ninette, en sanglotant. Je me suis laissée prendre au joli rêve, je croyais cela réalisable, comme si c’était réalisable. J’oubliais mon malheur, mon infirmité. Ne m’en voulez pas. Les aveugles vivent de rêve. Vous êtes venu vers moi comme un prince dans les contes. Et votre voix était douce. C’est tout ce que je connais de vous, la voix. Mais elle est telle qu’un reflet de votre visage. Vous devez lui ressembler, être blond

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