Page:Ades - Josipovici - Mirbeau - Le Livre de Goha le Simple.djvu/194

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une bave d’injure à la bouche. Il la guettait de l’œil, s’éloignait, revenait, invinciblement attiré, et, en définitive, indécis, ne sachant comment faire. De loin, il lui jeta des pierres, puis, de nouveau, il lui cracha au visage en hurlant :

— Tais-toi, si tu dis un mot je te tue !

Isis demeurait immobile et hautaine. Les outrages ne l’atteignaient pas. Avec des contorsions horribles, Goha lui dédia mille grimaces, mille grossièretés. Il s’abattit sur elle, l’étreignît et, de son poing fermé, brutalement, il lui donna des coups rapides et durs sur les joues, sur le crâne, sur les seins. Il poussait des cris convulsifs et brefs.

Alors, dans le désordre de ses sens, à travers ses vertigineux moulinets, il crut voir la déesse se lever, ouvrir les bras… Avec un cri de terreur, il tomba parmi les ronces.

Abd-el-Akbar était accouru.

— Que faisais-tu, demanda t-il ? Pourquoi frappais-tu cette femme ?

— C’est elle qui m’a frappé, s’écria Goha, en se relevant. Elle m’a donné un coup sur la tête…

Il coula ses yeux vers Isis. Elle était toujours immobile. Saisi d’épouvante, malgré les appels du vieillard, il s’enfuit à toutes jambes.

Lorsqu’ils se furent tous deux éloignés du rivage, Abd-el-Akbar tira les avirons et, d’un air grave, interrogea son compagnon.

— Es-tu sûr de ce que tu m’as dit ?… La cheika t’a frappé ?

— Et pourquoi te mentirais-je ? répliqua Goha