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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 2.djvu/145

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GENESE

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d’Israël — Dieu s’engaf ?cant à traiter toujours Israël comme « son peuple », eu favori, sous la coiulition (le recevoir de lui le culte qu’il luiadeiuamlé et d’être seul honoré par lui comme « son Dieu ». Dans ce plan, la Genèse a pour objet de faire connaître les origines de l’alliance, en relevant les faveurs spéciales dont Dieu a comblé les plus lointains ancêtres <r ! sraël, et les maynili([ues promesses qu’il leur a faites pour eux et leur postérité. L’auteur remonte jusqu’à la naissancedu premier cou[)le liumain, pour établir la liliatioii de la race élue depuis Adam, premier homme, jusqu’à Jacob et ses tils, pères des douze tribus. En tête de tout son récit, il place un tal)leau de la création du monde, couronnée par une consécration du septième jour, qui annonce, si elle ne l’implique déjà, l’institution du repos sabbatique, acte central du culte israélilique.

La préoccupation de l’intérêt particulier d’Israël se fait donc sentir dans toute la Genèse. Cependant une pensée plus générale la domine, surtout dans les onze premiers chapitres. Plus spécialement, les trois premiers veulent nous renseigner sur des sujets d’un intérêt suprême pour toute l’humanité : comment Dieu lit sorlir tous les êtres du néant ; comment, par une action spéciale, il créa le premier homme et la première femme ; l’épreuve à laquelle il soumit ces créatures firivilégiées, leur péché, leur déchéance et l’annonce de la réparation. Les huit chapitres suivants se [>résentenl encore comme une histoire ou du moins comme des fragments d’une histoire de tous les descendants du couple primitif. C’est à partir du chapitre xii que l’horizon, décidément, se rétrécit et cpie la narration, bornée aux destinées de la famille élue, n’offre plus que de rares échappées sur l’histoire générale.

Opinions sur la valeur historique de la Genèse

— La critique rationaliste la plus radicale (celle de Reuss, Renan, Kuenen, Wellhausen, etc.) n’accorde à aucune partie de la Genèse une parcelle quelconque d’autorité historique. Cependant l’évidence des conlirmations apportées aux récits bibliques par les monuments égyptiens et assyro-babyloniens, amène, semble-t-il, de plus en plus, même les rationalistes avancés » à admettre que l’histoire des patriarches, depuis Abraham, a pour base au moins partielle une tradition croyable. Dans les onze premiers cha])ilres, au contraire, ils ne trouvent plus que des léijendes ; le déluge seul peut-être rappellerait une catastrophe réelle. Surtout les trois premiers chapitres ne sont, d’après l’exégèse soi-disant indépendante, ’lu’un essai d’explication de l’origine des clioses, où des ; n)7/’es, imaginations populaires, se mêlent avec les spéculations d’une science dans l’enfance.

Quelques exégètes catholiques ont professé des opinions analogues, en s’efforçanl de les concilier avec l’inspiration de l’Ecriture. Déjà Origène avait soutenu que la Genèse devait être souvent interprétée comme une allégorie, où l’auteur sacré, sous l’apparence d’un récit historique, proposait un enseignement doctrinal. Le cardinal Cajetan a interprété de cette manière quelques parties des premières pages de la Genèse, notamment celles ijui relatent la création de la première femme et la tentation d’Eve. François Le.nor.m.i.nt a adopté plus complètement ce système et a cherché à l’établir dans ses Origines de l’Iiistoire d’apri’s la Bible et les traditions des peuples orientaux (iSSo-tSSi). Cet ouvrage a été mis à l’Imlex, en 1887. D’autres tentatives semblables qui, dei)uis lors, se sont fait jour, surtout par rapport aux trois premiers chapitres de la ripnèse, ont provoqué la décision de la Commission ISiblique du 30 juin lyog, concernant le caractère

liist<irit/iie de ces chapitres. Cette décision trace clairement sa voie à l’exégète catholique, même pour toute la Genèse. Nous devons en reproduire ici la substance.

Réponses de la Commission biblique. — Suivant la praticiue usitée, la question a été résumée en huit demandes auxquelles la Commissiun répond par oui ou non. et voici les conclusions qui résultent de ces réponses. Premièrement,

« les divers systèmes d’exégèse imaginés pour éliminer la

signilicalion littérale historique des trois premiers chapitres do la (ienése, ne reposent sur aucun f<mdement solide, en dépit de l’appareil scientilique qu’on a pu leur donner ».

La seconde demande détermine plus en paiticulier les systèmes visés dans la première ; ils ont en commun cette aVlirmation, que « les trois premiers chapitres de la ("lenèse ne contiennent pas des récits d’événements qui se soient vraiment passés ou des récits auxquels corresponde une réalité objective et la vérité historique ». Mais il y aurait là, d’après les uns, (( des fables empruntées aux mythologies et aux cosmogonies des peuples antiques, que l’auteur sacré aurait seulement expurgées de toute erreur polythéiste et adaptées à l’enseignement monothéiste » ; d’après les autres : « soit des allégories et des symboles, sans fondement dans la réalité objective, quoique proposés sous la forme de l’histoire, pour inculquerdes vérités religieuses et philosophiques ; soit enliu des légendes, en partie historiques et en partie de pure imiigination, librement arrangées en vue de 1 instruction et de l’édification »,

Un même temps qu’elle condamne ces théories, la Commission niiiintient la force des raisons qui militent pour le caractère historique des trois chapitres. Ces raisons, telles qu’indiquées dans cette demande, sont « le ton général et la forme historique du livre de la tlenése ; la liaison étroite des trois premiers chapitres entre eux et avec les chapitres suivants ; le multiple témoignage des Ecritures de 1 --Vncien et du Nouveau Te^tament ; le jugement presque unanime des saints Pères et le sentiment traditionnel, déjà établi dans le peuple israélite et toujours tenu par l’Eglise ».

Par la troisième demande et sa réponse, sont spécifiés les [passages qui, dans les trois premiers chapitres, veulent

Ï)lus particulièrement être interprétés dans le " sens littéral listorique » : ce sont « ceux où il s’agit de faits qui touchent les fondements de la religion chrétienne » : tels sont, entre autres, « la création de toutes choses par Dieu ; i l’origine du temps ; la création spéciale de l’homme : la formation de la promit-re femme avec une partie de la substance du premier homme ; l’unité du genre humain ; la félicité originelle de nos premiers parents dans l’état de justice, d intégrité et d immortalité ; le précepte imposé par Dieu à l’homme pour éprouver son obéissance ; la transgression du ]irécepto divin à l’instigation du diable sous la forme du serpent : la déchéance de nos premiers parents de cet état primitifd innocence et la promesse d’un Kédempteur futur ».

Nous ne sommes pas obligés, néanmoins, de donnera tous les détails des récits primitifs de la (ienèse la signification littérale historique. D’abord en elfet, la 4’réponse de la Commission nous apprend que, « dans l’interprétation des passages que les Pères et les docteurs ont entendus diversement, nous sommes libres de suivre et de défendre l’opinion que nous nous serons formée après un prudent examen, sous réserve du jugement de l’Eglise et en suivant l’analogie de la foi ». Il serait donc permis de ne pas prendre au sens propre des détails que les Pères no s accordent jias à interpréter de cette manière.

Il en est encore ainsi, d’après la à" réponse, « lorsqu’il ressort clairement des locutions elles-mêmes qu’elles sont employées improprement, par mét ; iphore ou par anthropomorphisme, et Iriisque le sens propre est condamné par la raison et impossible il maintenir ».

La C réponse affirme que certains passages sont susceptibles d une interprétation « allégorique et prophétique », en outre de l’interprétation littérale et historique présupposée.

Enfin les deux dernières réponses (5" et 8’) se rapportent à l’interprétation du premier chapitre en particulier. Nous y reviendrons.

Observations sur la position de la question.

— La Commission biblique n’a pas jugé nécessaire de répondre séparément aux deux questions que les exégètes distinguent d’habitude : i" Les trois premiers chapitres de la Genèse, dans l’intention de leur