Page:Adrienne Durville, Carnet de guerre 1914-1918 n°1.pdf/27

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sera effroyable.

5 heures. Tout Belfort est en rumeur ; le comt d’armes veut faire évacuer tout le monde possible et tout ceux qui ne sont pas de réelle utilité doivent s’en aller. Un peu plus on nous privait de notre médecin. Il faut un permis spécial qu’on obtient qu’avec les plus grandes difficultés ; je suis sûre que l’on va nous priver de la moitié de notre personnel. Cela prouve que l’on s’attend à un bombardement et que l’on ne veut pas de victimes inutiles. Voilà une chose que je n’écrirai pas à ma famille !

9 heures. Un de nos malades nous inquiète, celui qui est blessé au ventre. Mme des L. et Mlle R. vont chercher le médecin. Il demeure très près d’ici, mais en dehors de la ville. Elles sont arrêtées à la porte par le fonctionnaire et très impressionnées de voir cette baïonnette devant leur nez. Heureusement que leur livret militaire leur a permis de passer. Il faudra tâcher d’avoir le mot d’ordre tous les jours si pareil cas se représente ; mais cela sera bien difficile. Celui de ce soir est : Héros !

Samedi 15 août

J’ai du mal à croire que c’est aujourd’hui l’Assomption ! Nous vivons de façon si bizarre. Messe à 5 heures. Nos malades vont bien ; on mettra dans le jardin ceux qui pourront se lever. Un capitaine et deux soldats blessés sont morts à l’hôpital militaire. Il y a eu un grand nombre d’amputations. Pauvres gens.

Le major vient ; nous arrivons à lui escamoter nos malades et nous les gardons tous aujourd’hui ; il ne demande d’ailleurs pas mieux. Il nous confirme ce que nous savions déjà et que tous les soldats revenant du combat disent : les Allemands achèvent les blessés restés sur le champ de bataille, c’est ignoble !