Page:Affaire des déportés de la Martinique, 1824.djvu/153

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tant d’iniquités, afin que le gouvernement, sentant la nécessité d’en arrêter le cours, anéantît cette monstrueuse nomenclature d’ordonnances tout à la fois contraires au bien général et outrageantes envers les particuliers, ordonnances qui ne sauraient continuer d’être applicables aux gens de couleur libres, sans qu’on violât à leur égard tous les droits de la nature.

Ainsi, il résulte de tout ce qui précède que le gouvernement doit, dans sa justice et sa sagesse, leur donner une législation conforme à leurs mœurs, appropriée à leurs besoins, et digne du siècle qui a vu proclamer la Charte. Les gens de couleur libres s’adressent donc avec confiance au gouvernement de Sa Majesté, parce que leur conduite a toujours été irréprochable, quoiqu’on ait tout fait pour les pousser au désespoir. Ils osent lui représenter, comme un point essentiel et indispensable à leur bonheur, que l’exécution des nouvelles lois ne soit confiée qu’à des hommes probes, honnêtes et désintéressés, amis de l’ordre et ennemis des vexations ; et que les délégués de l’autorité n’aient à regarder les gens de couleur libres que comme de fidèles et loyaux sujets, qui, supportant les mêmes charges, et concourant de toutes leurs facultés à la prospérité de la mère-patrie, doivent jouir sans restrictions de tous les droits civils et politiques que la Charte accorde à tous les Français.

Au reste, sur quoi s’appuierait-on pour leur refuser la justice qui leur est due ? Viendrait-on nous répéter encore que la puissance des rois s’accroît de l’oppression des peuples ? Et c’est en France que l’on oserait tenir un pareil langage ! en France, où un roi ne se dit heureux que du bonheur de ses sujets ! On cherche, nous le savons, à effrayer le pouvoir ; on cherche à lui persuader que nous perdrons nos colonies à l’instant où les gens de couleur libres y possédant les droits qu’ils réclament, se glorifieront du titre de Français, et pourront, d’un hémisphère à l’autre, bénir le nom du monarque qui les aura affranchis des distinctions avilissantes auxquelles ils sont condamnés ! Nous ne répondrons pas à ces prévoyans conseillers ; l’absurde se réfute de soi-même.

Les gens de couleur libres de la Martinique et de la Guadeloupe, unis d’opinion, courbés sous le même joug, en butte aux mêmes outrages, et soupirant également après un meilleur avenir, ont enfin rompu un trop long silence. Ils pensent que les divers représentans nommés par les comités colo-

    tivement au commerce et aux colonies, sentait enfin qu’il lui est bien plus avantageux de les enrichir que de les faire servir de proie à une avide et aveugle fiscalité ; car ce ne sera jamais avec des colonies pauvres que le commerce national fera de bonnes affaires. »