Page:Affaire des déportés de la Martinique, 1824.djvu/172

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Tant qu’ils ont espéré justice par les voies régulières, et en empruntant le langage des supplians, ils ont négligé d’exercer une action criminelle contre l’administrateur qui livrait leurs personnes au pouvoir arbitraire.

Ils allaient même jusqu’à l’excuser sur ses intentions, et jusqu’à supposer qu’il plaidait leur cause devant le trône du monarque.

Mais puisque justice n’est pas faite, puisqu’on se repent d’avoir amené les déportés en France, ils n’auront pas touché en vain cette terre de liberté, ils ne s’en laisseront pas arracher volontairement, et ils prouveront qu’ils sont encore ses enfans, en réclamant hautement la protection de ses lois.

Aucun d’eux n’a été jugé ; aucun n’est donc coupable. Si personne n’est coupable, comment qualifier la déportation autrement que d’un attentat contre la liberté des personnes et contre la sûreté de la colonie ; disons plus, contre la sûreté de l’État ?

L’acte dont ils se plaignent est si effrayant par lui-même, on est tellement dans l’opinion qu’il n’existe plus de justice à la Martinique pour les Français de couleur, que ceux à la liberté desquels on n’a pas attenté, se sont hâtés de quitter cette terre malheureuse, préférant abandonner leurs propriétés et tous les liens qui attachent l’homme à son pays natal, pour conserver le dernier bien, la liberté.

Les arrestations ont commencé le 23 décembre 1823 à trois heures du matin sur la personne des supplians, Joseph Nullot, Montlouis Trébia, Joseph Millet, Zacharie Armand, Hilaire Laborde, Germain Saint-Aude, Dufond, Étienne Paschal, Angel Joseph Berne Verdet, Monganier et Édouard Nouille. Elles ont continué jusqu’au 15 mars 1824, date de leur embarquement pour la France.

On a refusé de leur donner communication de l’ordre de déportation. Cette injustice n’avait pas lieu, même sous le régime des lettres de cachet. Arrivés