Page:Affaire des déportés de la Martinique, 1824.djvu/192

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ou non, peu importe) volontairement l’oppresseur, s’évanouirait comme la fumée, s’il était soumis à un débat public et oral ; c’est une pure chimère.

Maintenant arrivons aux principes et à leur application. Supposé qu’il y ait eu des coupables, et que le bien de la colonie voulût qu’ils fussent punis, les lois coloniales avaient tracé la marche ; il y a des tribunaux dans la colonie ; ces tribunaux ont connu de l’accusation portée contre Bissette, Fabien et Volny ; ceux-ci du moins, si l’on a violé les formes et les lois, ont un moyen sûr d’en obtenir réparation ; la Cour de cassation fera droit à leurs griefs. Ceux-là sont jugés, et à leur égard, le ministère n’a d’autres devoirs à remplir que de transmettre les pièces qui lui sont remises à titre de dépôt, pour arriver plus sûrement à leur destination.

Mais quant aux déportés qui, quoi qu’on ait pu dire à V. E., ont touché le sol français, qui ont communiqué avec la mère-patrie, qui ont saisi, de leurs justes réclamations, les autorités locales et supérieures, à Brest et à Rochefort, dont plusieurs d’ailleurs ont débarqué ; que leur répondra-t-on ? Pourra-t-on dire qu’ils ont été jugés ? Pourra-t-on leur donner légalement la qualité de condamnés ?

Ces épithètes flétrissantes leur ont été données ; loin de nous la pensée d’accuser la pureté des intentions ; S. M. qui ne pourrait pas enlever au plus humble de ses sujets la moindre parcelle de sa propriété, aurait-elle délégué à d’autres le pouvoir de disposer arbitrairement de la liberté, qui est la première et la plus précieuse des propriétés ? on n’a pas informé V. E. de la différence immense qu’il y avait entre un tribunal légalement institué et le conseil de gouvernement qui a pris sur leur sort des décisions que l’on a toujours cachées.

La justice et l’administration sont deux choses depuis long-temps séparées, même aux colonies ; on pourrait en rapporter mille preuves ; nous les avons