Page:Affaire des déportés de la Martinique, 1824.djvu/214

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les parties de la mer y adjacentes, sur lesquelles s’étend la force habituelle de défense et de protection de la puissance continentale ; aucune autre puissance étrangère ne pourrait y faire paraître ses vaisseaux sans le consentement de la France, à moins de déclaration de guerre. La plupart des traités de paix et de commerce ont fixé à deux lieues des côtes la domination respective des souverains. Il y a plus ; depuis la loi du 4 germinal an II, titre 2, article 3, tout capitaine arrivé dans les quatre lieues de la côte est soumis à l’exhibition de son manifeste, à la visite, en un mot, à toute l’action de la loi continentale française. S’il ne peut être rien soustrait des choses à l’empire de la loi française, en cette position, assurément cette loi domine aussi sur les personnes françaises ou naturellement sujettes à la souveraineté française dans la même position.

Aucun crime, aucun délit, aucune contravention ne pourraient se commettre en rade de Brest ou de l’ile d’Aix, sans être répressibles selon la loi française. Le gouverneur de la Martinique, quelque pouvoir arbitraire qu’on lui suppose, ne pouvait donner l’ordre de conduire un individu sur le territoire ou sous la juridiction de la loi française du continent ; puis de le reprendre, de le soustraire à l’empire de cette loi, pour le conduire au Sénégal, ou à Cayenne, ou à Synamary, ou dans tout autre lieu de déportation. L’ordre du gouverneur expirait avec sa puissance, là où commençait le règne supérieur, la souveraineté prédominante de la loi continentale.

En France, il n’y a de détention légale possible que celles autorisées par le droit public de France. Si le déporté réclamait sa liberté pour en jouir sur le sol continental, assurément il n’était pas de pire condition que le dernier des esclaves qui aurait conquis sa liberté par le fait seul d’être placé sous le bénéfice de la loi française. L’ordre arbitraire de déportation imprime bien le sceau d’une servitude sur la victime ;