Page:Affaire des déportés de la Martinique, 1824.djvu/216

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Mais il ne faut pas confondre les matières purement administratives avec le contentieux administratif : aussitôt qu’une mesure administrative offense la propriété des personnes ou des choses, aussitôt peut naître la plainte qui donne lieu au contentieux administratif. Le ministre qui a l’administration, n’a pas le contentieux administratif dans ses attributions : juge, et directeur naturel des personnes qu’il emploie dans l’accomplissement des services publics, relativement aux fonctions qu’il leur confie, il n’est rien, il est sans autorité au respect des tiers qui prétendent être offensés par les actes administratifs de lui ou de ses agens, ou de tous fonctionnaires placés dans sa hiérarchie administrative.

Quand les déportés se sont plaints, soit de leur déportation comme d’un acte arbitraire, soit de leur embarquement forcé de Rochefort sur le Chameau, pour le Sénégal, le ministre aurait pu sans doute faire cesser cette violence, en prescrivant une conduite contraire à ses agens subordonnés : mais s’il ne le jugeait pas convenable, il était sans juridiction sur une pareille plainte ; elle faisait naître, un contentieux dévolu au conseil d’État, soit pour reconnaître la compétence du pouvoir judiciaire, soit pour annuler les actes arbitraires, soit pour rendre de suite les plaignans au bénéfice de la loi commune : mais dans aucun cas le ministre de la marine n’a pu, sur le territoire français, et contre les individus placés, par le seul fait de leur position, sous la protection de la loi commune, donner suite à l’acte du pouvoir arbitraire colonial. En cela, il commettait une double infraction :

1°. À la loi de sa propre compétence qui lui refuse le droit de statuer sur des plaintes qui intéressent la propriété des personnes et des choses ;

2°. À la loi commune, ou au droit public des Français, qui ne reconnaît sur son territoire ou dans