Page:Affaire des déportés de la Martinique, 1824.djvu/36

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doivent la vie à des négresses, sont exclus de toute participation à l’hérédité : on ne peut pas les reconnaître et tous les fidéicommis qui ont pour but de leur assurer des moyens d’existence, sont annulés : par-là, les blancs se sont placés dans le cas de se livrer sans contrainte au libertinage, et de ne pas même en supporter les charges.

On a poussé la naïveté jusqu’à dire, dans un réglement colonial du 12 mars 1806, que s’il y a des inconvéniens à ce que les blancs puissent faire des libéralités aux affranchis et à leurs descendans, « il n’y en a aucun à ce que ces derniers en exercent envers les blancs ; que c’est même fournir à ces affranchis les moyens d’acquitter les devoirs de la reconnaissance à l’égard de leurs patrons ou autres, en leur permettant de rapporter le bienfait à sa source. »

L’intention de ces réglemens odieux et tyranniques est évidente : on ne veut pas que les hommes de couleur libres deviennent propriétaires[1].

L’art. 6 d’un arrêté du 5 vendémiaire an XI, renouvelé du réglement du 6 novembre 1781 (art. 16), et d’un acte du 30 avril 1764, et confirmé lui-même par l’article 7 du réglement anglais du 1er novembre 1809, leur interdit l’exercice de la médecine, de la chirurgie et des autres arts libéraux. Pour terminer ce tableau de la situation des hommes de couleur, nous dirons qu’il ne leur suffit pas d’être réellement en possession de la liberté pour avoir droit d’en jouir. Ce n’est plus comme autrefois une présomption légale que l’on est né libre ; une jurisprudence récente[2] oblige les hommes de couleur à justifier à des époques très-rapprochées de leurs titres de liberté

  1. L’aveu formel en est consigné dans un acte des magistrats de la Guadeloupe du 7 brumaire an XIV.
  2. La première sommation de ce genre, date du 7 juillet 1720.