Page:Affaire des déportés de la Martinique, 1824.djvu/83

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25 janvier 1765, exige que le gouverneur s’abstienne de tout ce qui appartient aux tribunaux.

Or comme les tribunaux ont le droit de prononcer le bannissement ou la déportation, ainsi que le prouve assez l’arrêt rendu par la Cour royale de la Martinique le 12 janvier 1824, maintenant déféré, par Bissette, Fabien, Volny et autres, à la censure de la Cour suprême, il est évident que le gouverneur ne peut s’arroger un pouvoir confié par la volonté de la loi à la décision des cours.

Ce serait un moyen de se soustraire à l’accomplissement des formalités établies par l’ordonnance criminelle de 1670, qui, à défaut du Code d’instruction criminelle, est restée en pleine vigueur, en vertu de l’enregistrement du 5 novembre 1681.

Ces principes sont confirmés par un décret de l’Assemblée coloniale du 21 juillet 1790[1], approuvé par le gouverneur, et enregistré au Conseil souverain le 24. Ce décret porte que le gouverneur ne peut exercer le pouvoir judiciaire[2].

En un mot, il n’existe dans les lois enregistrées dans la colonie avant 1789, aucune disposition qui autorise directement ou indirectement les bannissemens ou déportations sans jugement.

Et depuis 1814, S. M. n’a point accordé aux gou-

  1. Code de la Martinique, tome IV, p. 214.
  2. Il existe dans le Recueil des constitutions des Colonies, par Moreau de Saint-Méry, une ordonnance du roi du 24 avril 1679, enregistrée dans les tribunaux de Saint-Domingue, qui défend aux gouverneurs de mettre les habitans en prison, et de les condamner à l’amende. Cette ordonnance est ainsi motivée : « Sa Majesté ayant établi un conseil souverain en chacune des isles pour y administrer la justice ; et, ayant été informée que quelques-uns des gouverneurs particuliers ont quelquefois pris l’autorité d’arrêter, et de constituer prisonnier aucuns desdits habitans, ce qui est entièrement contraire au bien et à l’augmentation de la colonie. »