Page:Agassiz - Études sur les glaciers, 1840.djvu/147

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suivant de Saussure, sur le sommet du Mont-Blanc ; voici ce qu’il dit à cet égard : « Dès qu’il s’élève un vent un peu fort, ce vent déchire ce vernis, soulève ces écailles et les fait voler à une très-grande hauteur. Il s’y joint des neiges en poussière que le vent entraîne encore plus facilement. On voit alors, des vallées voisines, une espèce de fumée que l’on prendrait pour un nuage qui s’élève de la cime en suivant la direction du vent. Les gens du pays disent alors que le Mont-Blanc fume sa pipe[1]. » J’ai vu cette année le névé recouvert de semblables croûtes de glace au bas de la Strahleck. On conçoit que sur les plus hautes cimes l’évaporation ait à-peu-près seule prise sur les neiges ; mais comme l’air est habituellement à une température trop peu élevée, il ne s’en absorbe qu’une faible partie, et l’on devrait s’attendre à les voir s’accumuler indéfiniment, si les vents n’en enlevaient une bonne partie. Aussi suffit-il du plus léger vent pour soulever cette neige fine et l’emporter dans toutes les directions.

L’action dissolvante du soleil sur les neiges augmente en raison inverse de la hauteur ; mais ici encore il faut tenir compte de la position des cimes ; sur les flancs septentrionaux les neiges sont plus persistantes que sur les flancs méridionaux ; elles se transforment moins facilement en glace. C’est essentiellement sur

  1. De Saussure, Voyage dans les Alpes, T. 4, p. 203, § 2013.