Page:Agassiz - Études sur les glaciers, 1840.djvu/150

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de vastes espaces couverts de verdure, qui jamais, de souvenir d’homme, n’ont été envahis par la glace. Or, s’il était vrai, comme on l’a prétendu, que la glace des glaciers se reproduisît sur place par la congélation de la neige qui y tombe pendant l’hiver, on ne concevrait pas pourquoi la neige qui tombe en aussi grande abondance sur ces espaces non recouverts par les glaciers, ne se transformerait pas également en glace, et pourquoi les glaciers se trouveraient de préférence dans les vallées[1].

Mais, me direz-vous, du moment que la neige fond pendant le jour, et que l’eau qui est résultée de cette fonte se congèle pendant la nuit, toutes les conditions que vous avez assignées à la formation des glaciers, c’est-à-dire à la transformation de la neige en glace se trouvent réunies ; et, cela étant, pourquoi ne se formerait-il pas des glaciers à des niveaux inférieurs à celui des hauts névés ? Je suis loin de prétendre qu’on ne rencontre pas quelquefois, au printemps, des glaces en des endroits où, une année auparavant, l’on avait observé des neiges. Souvent les guides des Alpes

  1. Je sais très-bien que par l’action réfrigérante de ses couches inférieures le glacier active pendant la nuit la congélation de l’eau résultant de la fonte de la neige qui gît à sa surface ; mais cette influence ne saurait être d’aucun effet sur la formation même des glaciers, puisqu’à l’époque où s’opère dans nos Alpes la fonte des neiges hivernales, c’est-à-dire pendant les mois d’avril, de mai et de juin, la température tombe naturellement presque toutes les nuits au-dessous de 0°.