poserait facilement pour un ange, perd toute sa grâce dès qu’on lui résiste. Elle trépigne à la moindre occasion, montre les poings, se révolte et quelquefois lève même sa petite main potelée sur sa bonne et sur sa sœur. Ce défaut, qui désole ses parents, elle ne s’en corrigera pas facilement ; car Gilberte est étourdie, et bien qu’elle ait promis souvent de ne plus recommencer de pareilles scènes, elle ne prend pas sur elle, et sans cesse il faut la punir pour de nouvelles colères.
Quant à Anne-Marie, c’est une enfant de dix ans, raisonnable et sérieuse comme on ne l’est guère à cet âge ; des yeux noirs, un peu langoureux, éclairent sa jolie figure d’un rose pâle, encadrée de boucles d’un noir bleuâtre. La petite fille est très-grande pour son âge, et dans sa démarche distinguée on voit poindre la grâce créole qu’elle a reçue de sa mère, née à l’île Bourbon. Anne-Marie est un peu indolente, et sa petite sœur, qui est la pétulance même, s’impatiente souvent de sa lenteur, qui lui paraît désespérante ; mais, sitôt qu’elle voit les larmes se faire jour dans les yeux d’Anne-Marie, Gilberte se jette dans ses bras et ne