Page:Agnès de Navarre-Champagne - Poésies, 1856.djvu/97

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Ainssi est des amans qui vivent en désir —,
Il en y a aucun qu’on ne puet assevir.
N’il ne prendent en gré gracieus recueillir,
Dous ris, ne biaus parler que il puissent oïr :
Ains mendient des biens qu’amours a à partir,
Et s’en ont à plenté pour leurs cuers soustenir,
Mais pas ne leur souffit * si ne font que languir,
Quant à joie grigneur ne pueent avenir.

Et des autres y a qui ne vuellent joïr

Fors d’un très dous regart, ou de leur dame voir,

Ou de ce qu’il feront doucement conjoir,

Ou d’amer loyaument, s’on le daigne souffrir ;

Et si bien leur souffit, qu’il ne leur puet venir

Cuer de plus désirer, tant y ont grant plaisir,

Dont qui l’un de ces biens prent à goust de mérir,

Je dis qu’il a mercy, quant plus ne vuet quérir.

Car avis m’est que mercy autre chose
N’est, fors avoir ce qu’amans plus désire.
Et s’il ha son désir, sans contredire
Il ha mercy, dont en pais se repose ;
Mais jà mercy n’iest un amant enclose
Pour rien qu’amours puisse faire ne dire ;
Car souffisance à li ne fait souffire,
Qui des vertus est la fleur et la rose.

Si veil mercy souffisance appeler,

Et ensiment souffisance mercy,

Car c’est tout un t ne je ne puis trouver

Que qui a l’un, qu’il n’ait l’autre aussi,