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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

ventionnel, dans une brochure intitulée Les Radicaux et la Charte, tout en confessant ses sympathies républicaines, exprimait le désir de se conformer à la volonté nationale attachée aux institutions de Juillet, et montrait que la réforme n’était aucunement en contradiction avec elles. « Insensé, disait-il, quiconque demanderait aux révolutions ce qu’il peut obtenir du simple vœu des électeurs.» Quant à M. Duvergier de Hauranne[1] esprit actif, désintéressé, d’une inattaquable probité politique, il conjurait tous les chefs de l’opposition de s’unir pour provoquer ce que l’on devait plus tard appeler la pression du dehors, c’est-à-dire une agitation extra-parlementaire, de nature à convaincre le pouvoir que le pays blâmait la politique conservatrice et voulait entrer dans les voies d’un progrès large et sincère.

Ces deux écrits non concertés, dictés par la conscience d’un état de choses où tout semblait perdu si l’on ajournait les résolutions hardies, facilitèrent le rapprochement des radicaux et des dynastiques. Depuis quelque temps, le comité central des élections y travaillait. Ce comité venait de remporter des succès signalés dans les élections municipales et dans celles de la garde nationale. À l’instigation de MM. Marrast et Duvergier de Hauranne, d’accord pour commencer l’attaque qui, dans la pensée du premier, devait ébranler la dynastie, tandis que, selon le programme du second, elle devait seulement renverser le ministère, on rédigea une pétition qui fut approuvée par les comités locaux, par les chefs parlementaires, et qu’appuya toute la presse libérale ; on résolut d’organiser une manifestation imposante et de réveiller l’opinion engourdie en élevant une tribune libre en face de la tribune asservie du parlement : un banquet fut décidé.

Il n’y avait rien d’illégal, ni même d’insolite dans une telle réunion. Non-seulement dans les usages de l’Angleterre politique les banquets étaient considérés comme une

  1. De la Réforme électorale et parlementaire.