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HISTOIRE

per les communications entre le Palais-Bourbon et l’École militaire. On a vu passer une colonne de trois à quatre cents hommes en blouse qui ont parcouru une grande partie du faubourg Saint-Germain, en criant : « À bas l’Assemblée ! » Enfin le bruit général est que l’insurrection gagne du terrain et va se porter en masse sur le Palais-Bourbon.

À une heure, les représentants entrent en séance. L’agitation est extrême dans la salle et au dehors. Ceux des représentants qui appartiennent à l’armée ou à la garde nationale paraissent en uniforme. Cet aspect inusité produit une sensation très-triste. Des généraux, des aides de camp, des officiers d’ordonnance vont et viennent dans les couloirs. On voit passer le général Cavaignac qui s’installe sur le péristyle, d’où il observe les mouvements de la place de la Concorde. La physionomie du président Senard exprime la plus vive angoisse.

Le général Lebreton propose à l’Assemblée d’envoyer quelques-uns de ses membres pour haranguer le peuple. « Ils parcourraient la ville à la tête des colonnes de troupe, dit-il ; ils prêteraient ainsi à l’armée une grande force morale. La vue des insignes de la représentation nationale produirait, sans aucun doute, sur le peuple de Paris, une impression salutaire. Les représentants pourraient, d’ailleurs, adresser au président des informations précises sur l’état des choses que l’on ne connaît jusqu’ici que par une foule de rapports vagues, exagérés ou contradictoires. » Plusieurs représentants émettent l’avis que l’Assemblée en masse se porte hardiment à la rencontre de l’insurrection. Mais ces propositions ne sont pas agréées ; on en discute les avantages et les inconvénients au milieu du tumulte ; le président, pour y mettre fin, annonce que l’on va passer à l’ordre du jour, c’est-à-dire à la suite de la discussion sur le rachat des chemins de fer.

Alors, plusieurs représentants lisent à la tribune des projets de rachat. M. Wolowski développe un projet de décret pour l’organisation du crédit territorial, que personne