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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

Brandebourg se présenta, au nom du roi, pour lui intimer l’ordre de se dissoudre, son président Unruhe refusa de lever la séance. Deux cent cinquante-deux représentants contre trente déclarèrent qu’ils ne se sépareraient pas ; mais comme ils étaient décidés à n’agir que par les voies légales et ne voulaient pas faire appel à l’insurrection, la force armée les expulsa, les poursuivit partout où ils essayaient de se réunir ; la garde nationale, qui les soutenait, fut dissoute. La nouvelle de la prise de Vienne vint achever leur défaite. Frédéric-Guillaume, résolu à ne plus rien ménager, chargea le général Wrangel de soumettre Berlin. L’état de siége fut proclamé, et, le 5 décembre, le roi, portant au comble l’ingratitude, le mépris de sa parole et l’oubli de son honneur, octroya à la Prusse une constitution qui effaçait les dernières traces de ses concessions et remettait toutes choses à peu près dans l’état où elles étaient avant la révolution.

Pendant que les souverains absolus, secrètement encouragés par la Russie, agissaient de la sorte à Naples, à Vienne, à Milan, à Pesth, à Berlin, et reprenaient peu à peu, par la ruse d’abord, puis par la force, tous leurs avantages, la diplomatie française, depuis le ministère de M. de Lamartine jusqu’à celui de M. Bastide, suivait la même marche incertaine et se laissait partout effacer ou éconduire. Mal informée ou mal servie par des agents dont les uns, qui appartenaient à l’école révolutionnaire, s’étourdissaient du bruit d’une démagogie tapageuse et croyaient que les clubs menaient le monde, et dont les autres, suivant les anciens errements de la diplomatie dynastique, ne savaient ou ne voulaient pas faire parler la France au nom de la Révolution, elle entamait avec les princes des négociations timides, perdait un temps précieux, laissait s’engourdir l’opinion. Bientôt, entre la Russie qui menaçait d’intervenir et l’Angleterre qui l’abusait par une amitié feinte, entre la diète centrale qu’il négligeait, la Prusse et l’Autriche qui se jouaient de lui, le gouvernement du gé-