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L’ÉCLAIREUR.

faire un geste et de prononcer un mot, toutes ses prévisions furent déjouées, et il demeura dans la plus complète ignorance.

Ce silence prolongé augmenta encore l’inquiétude de don Stefano, et le plongea au bout de quelque temps dans une anxiété telle qu’il résolut, coûte que coûte, d’en sortir. Mettant presque aussitôt son projet à exécution, il fit un mouvement comme pour se lever, et ouvrit brusquement les yeux en jetant autour de lui un regard circulaire et investigateur.

— Comment vous sentez-vous ? lui demanda Bon-Affût en se penchant vers lui.

— Bien faible, répondit don Stefano d’une voix dolente ; j’éprouve une pesanteur générale et je sens d’affreux bourdonnements dans les oreilles.

— Hùm ! continua le chasseur, cela n’est pas dangereux, il en est toujours ainsi à la suite d’une chute.

— J’ai donc fait une chute, reprit le blessé, que la vue de Ruperto, qu’il avait reconnu, commençait à rassurer.

— Dame ! il est probable, puisque nous vous avons ramassé étendu sur le sable auprès du gué del Rubio.

— Ah ! c’est là que vous m’avez trouvé ?

— Oui, il y a environ trois heures.

— Merci du secours que vous m’avez donné, sans lui il est probable que je serais mort.

— C’est fort possible ; mais ne vous hâtez pas de nous remercier.

— Pourquoi donc ? demanda don Stefano en dressant subitement les oreilles à cette réponse ambiguë qui lui paraissait une menace déguisée.

— Eh ! qui sait, repartit Bon-Affût avec bonhommie, nul ne peut répondre de l’avenir.

Don Stefano, dont les forces revenaient rapidement et qui déjà avait reconquis toute sa lucidité d’esprit, se dressa