Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/125

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leurs rifles sur leurs épaules et sortirent du meson.

Le moine les suivit des yeux.

— Oh ! murmura-t-il, je crois que je puis me fier à ceux-là, ils ont encore dans les veines quelques gouttes de ce loyal sang français qui méprise la trahison. C’est égal, ajouta-t-il comme par réflexion, je prendrai mes sûretés.

Après cet aparté, il se leva et regarda autour de lui.

La salle était pleine d’aventuriers qui buvaient ou jouaient au monte et dont les énergiques figures tranchaient dans la demi-obscurité de la salle, à peine éclairée par une lampe fumeuse.

Après un instant de réflexion, le moine frappa résolument sur la table avec son poing fermé, en criant d’une voix haute et accentuée :

— Señores caballeros, veuillez m’écouter, je vous prie ; j’ai, je le crois, une proposition avantageuse à vous faire.

Les assistants tournèrent la tête, ceux qui jouaient abandonnèrent pour un moment leurs cartes et leurs dés ; seuls les buveurs conservèrent en main les verres qu’ils tenaient, mais tous s’approchèrent du moine, autour duquel ils se groupèrent avec curiosité.

— Caballeros, continua-t-il, si je ne me trompe, vous êtes tous ici des gentilshommes que la fortune a plus ou moins maltraités.

Les aventuriers, par un mouvement automatique d’une régularité inouïe, baissèrent tous affirmativement la tête à la fois.

— Si vous le voulez, reprit-il avec un sourire imperceptible, je me charge de réparer les torts qu’elle a eus à votre égard.

Les aventuriers dressèrent les oreilles.