Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/251

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Fray Ambrosio et le ranchero, tenus en respect par le chef indien, n’osaient intervenir.

Don Pablo s’avança d’un pas lent et mesuré vers le bandit ; quand il fut à dix pas de lui, il s’arrêta, et le regardant fixement :

— Cèdre-Rouge, répéta-t-il d’une voix calme, rendez-moi ma sœur.

— Jamais !… répondit le squatter d’une voix étranglée par la rage.

Cependant le moine et le ranchero s’étaient rapprochés sournoisement près du jeune homme, épiant le moment propice de se jeter sur lui.

Les cinq hommes réunis dans cette salle offraient un étrange et sinistre aspect aux lueurs incertaines qui filtraient par les fenêtres, chacun d’eux, la main sur ses armes, prêt à tuer ou à être tué et n’attendant que l’occasion de se précipiter sur son ennemi.

Il y eut un instant de silence suprême. Certes, ces hommes étaient braves ; dans maintes circonstances ils avaient vu la mort sous toutes les formes, et pourtant le cœur leur battait à rompre leur poitrine, car ils savaient que le combat qui allait s’engager entre eux serait sans trêve ni merci.

Enfin don Pablo reprit la parole :

— Prenez garde ! Cèdre-Rouge, dit-il, je suis venu vers vous, seul et loyalement ; je vous ai redemandé ma sœur à deux reprises différentes, vous ne m’avez pas répondu, prenez garde !

— Ta sœur est une chienne que je vendrai aux Apaches ! hurla le squatter. Quant à toi, maudit, tu ne sortiras que mort ; malédiction sur moi si ton cœur ne sert pas de gaîne à mon couteau !