Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/266

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rapports de goût. Quoi qu’il en soit, le fait est certain. Valentin mordait à belles dents pour la seconde ou la troisième fois dans son gâteau d’hautle, lorsque tout à coup il s’arrêta subitement, le bras en l’air, la tête penchée en avant, comme si un bruit insolite avait soudain frappé son oreille.

Curumilla avait imité son ami. Tous deux écoutaient avec cette attention profonde que donne seule l’habitude de la prairie.

Tout bruit est suspect au désert. Toute rencontra est redoutée, surtout celle de l’homme.

Un laps de temps assez long s’écoula sans que le bruit qui avait ému les chasseurs se renouvelât.

Un instant ils crurent s’être trompés. Valentin mordit dans son hautle, mais il s’arrêta subitement.

Cette fois il avait distinctement entendu un bruit semblable à celui d’un soupir étouffé, mais si faible, si sourd, qu’il fallait l’oreille exercée du chercheur de pistes pour l’avoir entendu.

Curumilla lui-même n’avait rien perçu ; il regardait son ami avec étonnement, ne sachant à quoi attribuer l’agitation dans laquelle il le voyait.

Valentin se leva précipitamment, saisit son rifle et s’élança du côté de la rivière ; son ami le suivit en toute hâte.

C’était de la rivière, en effet, qu’était parti le soupir plutôt deviné qu’entendu distinctement par Valentin.

Heureusement que la rivière n’était éloignée que de quelques pas.

Dès que les chasseurs eurent bondi par-dessus les fourrés qui les cachaient, ils se trouvèrent sur la rive.

Alors un affreux spectacle s’offrit subitement à leurs yeux effrayés.