Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/289

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gie indomptable et une résolution à toute épreuve.

Dès qu’il eut pris son parti, il l’exécuta : avec une peine extrême et des douleurs atroces, il parvint à placer sur la plaie qu’il avait à l’épaule son mouchoir roulé en tampon, afin d’arrêter le sang qui coulait abondamment de sa blessure.

11 resta plus d’une heure avant de parvenir à se tenir droit sur ses pieds ; souvent il se sentit défaillir, une sueur froide perlait à la racine de ses cheveux, il avait des bourdonnements dans les oreilles, tout semblait tourner autour de lui ; mais il se roidit contre la douleur, il joignit les mains avec effort, leva vers le ciel ses yeux pleins de larmes, et du fond du cœur il murmura

— Mon Dieu ! daignez soutenir votre serviteur, il a placé en vous tout son espoir et toute sa confiance.

La prière, lorsqu’elle est faite avec foi, produit sur l’homme un effet dont les conséquences sont immédiates ; elle le console, lui donne le courage et lui rend presque les forces qui l’avaient abandonné.

Ce fut ce qui arriva au père Séraphin. Après avoir prononcé ces quelques mots, il se mit résolûment en marche, assurant ses pas chancelants avec un bâton, qu’un hasard providentiel avait placé près de lui.

Il fit ainsi près d’une demi-lieue, s’arrêtant à chaque instant pour reprendre haleine ; mais les forces humaines ont des limites qu’elles ne peuvent franchir : malgré les efforts qu’il faisait, le missionnaire sentit enfin ses jambes manquer sous lui, il comprit qu’il ne pouvait aller plus loin, et il se laissa tomber au pied d’un arbre, certain d’avoir tenté l’impossible pour son salut, et s’en remettant désormais à la Providence du soin de le sauver.