Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/422

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— Que veulent dire ces mots, sans doute !

— Ceci, dit l’Indien d’une voix brève : les guerriers que mon père espérait voir arriver ce matin ou cette nuit à son secours ont été dispersés par mes jeunes gens comme les feuilles que balaye le vent d’automne ; ils ne viendront pas.

Un murmure d’étonnement, presque de frayeur, parcourut les rangs de l’assemblée.

Le sachem laissa retomber en arrière les longs plis de la robe de bison dans laquelle il était pittoresquement drapé, saisit à sa ceinture la chevelure sanglante qui y pendait, l’en arracha, et la jetant aux pieds du général :

— Voici, dit-il d’une voix sombre, la chevelure de l’homme qui commandait les guerriers de mon père ! Le chef des Faces Pâles la reconnaît-il ? Cette chevelure a été prise par moi sur le crâne de celui qui devait venir, et qui, à cette heure, est parti pour les prairies bienheureuses de sa nation.

Un frisson de terreur parcourut les rangs de l’assemblée à la vue de la chevelure ; le général sentit s’évanouir le peu de courage qui jusqu’alors l’avait soutenu.

— Chef ! s’écria-t-il d’une voix tremblante, est-il possible que vous ayez fait cela ?

— Je l’ai fait, répondit froidement le sachem. Maintenant, adieu ! je vais retrouver mes jeunes gens qui s’impatientent de ma longue absence.

Après ces mots, le Comanche tourna fièrement le dos au gouverneur et fit quelques pas pour sortir de la salle.

— Quelques minutes encore, chef ! s’écria le général ; peut-être sommes-nous plus près de nous entendre que vous ne le supposez.