Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/427

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apparition imprévue, qu’il ne put s’empêcher de s’écrier avec cet accent de gaieté caustique qui formait le fond de son caractère :

— Que diable venez-vous faire ici, seigneur gouverneur ? seriez-vous, vous aussi, devenu tout à coup un affreux conspirateur comme on prétend que nous le sommes ?

Avant de répondre, le général se laissa tomber sur un siége en essuyant avec son mouchoir la sueur qui ruisselait sur son front, tant il avait mis de hâte à se rendre à la prison.

Trois ou quatre officiers étaient demeurés immobiles sur le seuil de la porte toute grande ouverte.

Les condamnés ne comprenaient rien à ce qui se passait.

— Est-ce que par hasard, dit en riant le général Ibañez, qui n’en croyait pas un mot, vous viendriez nous rendre la liberté, mon cher gouverneur ? ce serait un trait des plus galants et dont je vous aurais la plus vive reconnaissance.

Le général Ventura releva la tête, fixa sur les prisonniers des yeux pétillants de joie et leur dit d’une voix entrecoupée.

«Oui, mes amis ! oui, j’ai voulu moi-même venir vous annoncer que vous êtes libres ; je n’ai consenti à laisser à personne le soin de vous apprendre cette heureuse nouvelle.»

Les condamnés reculèrent avec étonnement.

— Hein ! s’écria le général Ibañez, est-ce sérieusement que vous parlez ?

Don Miguel considérait attentivement le gouverneur, cherchant encore à deviner sur son visage les causes de sa conduite.